PLATON/SOCRATE
PLATON
Platon, L’Amour et la Beauté :
L’itinéraire vers les Essences ne se comprend lui-même que par la dialectique de l’Amour, que Platon nous a si bien décrite dans le Banquet.
– En effet, l’élan amoureux vers la Beauté représente, aux yeux du philosophe, un puissant instrument d’accès au vrai.
– Intellectualisé et discipliné, l’Amour se confond avec la Dialectique, dont il incarne le dynamisme et la vie.
Qu’est ce, en effet, que l’Amour ?
– C’est un manque, une pénurie, une pauvreté qui nous signale notre incomplétude et notre vide, un élan vers ce que nous ne possédons pas, une aspiration à la Beauté elle-même.
– Grâce à lui, nous pouvons, à partir des beautés corporelles et sensibles, progresser jusqu’à la Beauté de l’âme, puis jusqu’à celle des occupations et des lois.
Enfin, à l’étape suprême, c’est l’Idée même du Beau, dans sa pureté et son indépendance, que pourra atteindre le philosophe.
Il est difficile de définir cette Idée de Beau.
– Formant une unité en elle-même, échappant à la génération et à la corruption, elle se caractérise par la pureté absolue, la transcendance par rapport au sensible et autres « sornettes mortelles »…
– la Beauté, c’est la désincarnation ultime, l’éclat et la splendeur de ce qui transcende absolument l’empirique et le concret.
Socrate, Réminiscence et maïeutique :
La dialectique des Idées et la théorie de l’Amour conduisent à parler d’un idéalisme platonicien (au sens fort du terme idéalisme) comme doctrine attribuant aux Idées ou Essences une existence en soi, indépendance
de l’esprit et des choses individuelles (NB : le mot « idéalisme » n’est pas de Platon lui-même).
Mais on peut se demander quels arguments permettent ainsi à Platon d’élaborer cette théorie « idéaliste » des Essences.
– Il semble que maïeutique et réminiscence constituent deux éléments majeurs justifiant cette élaboration et cette doctrine.
La Maïeutique :
– Elle désigne cet art d’accoucher les esprits :
? Art par lequel Socrate conduisait ses interlocuteurs à se découvrir eux-mêmes, à prendre conscience de leurs richesses implicites.
? Ainsi, dans le dialogue le Ménon, le petit esclave ignorant découvre-t-il lui-même, par les vertus de sa propre intelligence, comment construire un carré double d’un carré donné.
– Si chacun de nous peut ainsi, par le dialogue et la maïeutique, naître à lui-même et ressaisir des vérités (cachées), ne serait-ce pas parce qu’il se souvient alors d’une vérité jadis contemplée ?
? Telle est la doctrine de la Réminiscence
La Réminiscence :
– Nous avons, durant nos existences antérieures, contemplé les Idées, lesquelles ne constituent, dès lors, que des ressouvenirs.
– Apprendre, c’est se remémorer à la vérité jadis aperçue.
– Tout l’exercice philosophique vise à maîtriser et à organiser ce contenu secret, caché, fruit d’une lointaine contemplation.
Platon, la Morale et la politique:
Ainsi, la réponse apportée au problème spéculatif et la constitution d’une dialectique s’appuyant sur la réminiscence permet aussi à Platon de résoudre le problème moral et politique.
Les Sophistes, ces maîtres de rhétorique et d’éloquence, critiqués par Platon qui voyait en eux de simples producteurs de mensonges, de faux prestiges et d’illusions (la sophistique étant définie par lui comme négoce
et trafic de discours), avaient, en effet, sapé la croyance en un Absolu permettant à la morale de s’édifier :
– La vérité, pensaient-ils, n’est rien d’autre que la subjectivité.
– Leur doctrine relativiste conduisait souvent au pur immoralisme.
Avec Platon, la morale redevient, bien au contraire, possible…
– Quand, après avoir contemplé les Idées, le philosophe redescend dans la « caverne », il est désormais en mesure d’édifier une morale et une politique.
– La fameuse Allégorie de la Caverne désigne, en effet, ce récit par lequel Platon peint notre condition :
? Les hommes sont semblables à des prisonniers qui prennent les ombres projetées devant eux sur la paroi de la caverne pour la vérité.
? Le prisonnier que l’on détache et qui sort au dehors symbolise le philosophe accédant aux Essences.
La vertu dans cette perspective, désigne la participation aux Essences et à la véritable connaissance, une science du Bien et du Mal inséparable de la dialectique.
Chez Platon, et d’une manière générale dans toute la pensée hellénique, vertu et morale sont, en effet, de l’ordre du savoir.
– Nul n’est méchant volontairement.
– Etre courageux, c’est posséder la science de ce qui est redoutable ?
– Etre juste, c’est accéder à la connaissance de l’harmonie de nos forces intérieures.
– La justice (individuelle) représente donc un savoir juste. Dans l’âme juste, la partie raisonnante (l’esprit) connaît et commande, maitrisant :
? le désir, sauvage et irréfléchi (la concupiscence)
? La colère, partie impétueuse qui peut, parfois, devenir l’alliée de la raison
– La justice désigne, dans cette perspective, la vertu assurant sa fonction à chaque partie de l’âme.
Dans l’Etat, la justice représente une harmonie et un équilibre :
– Les artisans et travailleurs divers obéissent
– Les guerriers défendent la cité
– Les magistrats commandent à ces deux classes subalternes.
La justice individuelle représente l’équilibre d’une âme saine où chaque partie joue son rôle et obéit à sa fonction. La justice politique, quant à elle, désigne l’équilibre de la cité où le « philosophe-magistrat » commande :
– Chaque classe exécute la fonction qui lui est propre
– Au sommet de la hiérarchie, se trouve celui qui « sait », qui a contemplé les Essences, le Bien : Le Philosophe.
Telle est la solution que Platon apporte au problème politique : « le philosophe-roi ». Ainsi, pour réaliser la justice dans la cité, il faut donc que les rois deviennent philosophes, ou que les philosophes deviennent rois.
Telle est cette philosophie qui a tant marqué la réflexion occidentale, aussi bien dans l’analyse de l’amour et du désir que par celle de la dialectique spéculative.
Conclusion du cours sur Platon
Platon, mort il y a plus de 23 siècles, a dessiné des chemins qui continuent de fasciner toute notre civilisation et notre culture.
En cette voie, il nous conduit de l’opinion (connaissance inférieure, faculté intermédiaire saisissant les choses qui flottent entre le néant et l’être absolu), jusqu’à la science (connaissance rationnelle permettant
d’atteindre l’essence de la vérité ) : Itinéraire qui hante encore notre temps et auquel se réfèrent encore bien des penseurs et des savants contemporains.
Date de dernière mise à jour : 25/05/2023